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24 août 2018 5 24 /08 /août /2018 11:48

     Le roman de guerre, fiction inspirée du vécu de son auteur, Henri BARBUSSE (1873-1935), paru sous forme de feuilleton dans le quotidien L'Oeuvre à partir du 3 août 1916, puis intégralement à la fin de novembre 1916 aux éditions Flammarion, est un exemple type de littérature contre la guerre paru en pleine première guerre mondiale. Traduit en anglais dès 1917 (Under fire), il connait un succès chez un large public. Ce livre, pourtant critique par rapport à la guerre et autorisé par la censure malgré sa rupture avec la propagande, s'inscrit dans un contexte de lassitude (de l'arrière notamment car à l'avant c'est plutôt l'horreur) par rapport à la guerre qui s'exprime par ailleurs dans un rapport de forces mouvant où la classe politique apparait de plus en plus divisée, sans rompre avec l'union sacrée. 

     Henri BARBUSSE, écrivain reconnu très jeune dans le milieu littéraire en France, qui exerce professionnellement dans la presse, s'engage (en dépit de son engagement de pacifiste avant-guerre) malgré des problèmes pulmonaires en 1914, dans l'infanterie. Il participe aux combats en première ligne jusqu'en 1916. Il tire de son expérience son roman Le Feu, qui se présente comme un récit sur la Première Guerre Mondiale, dont le réalisme soulève les protestations du public de l'arrière autant que l'enthousiasme de ses camarades de combat. C'est que l'opinion publique ne perçoit la guerre qu'à travers ce que les autorités veulent bien lui en dire et jusque-là se posait surtout la question de savoir ce que faisais ces bidasses (qui aurait déjà dû gagner cette guerre qui traine) qu'elle ne voit qu'à l'occasion de ses permissions à l'arrière, notamment dans les villes. Cette opacité de la guerre, les bipasses en question la perçoivent eux aussi, dans un mélange d'agacement et de frustrations. 

   Le roman parait intégralement, après sa diffusion en feuilletons, à la fin de novembre 1916 aux éditions Flammarion, alors qu'Henri BARBUSSE est cofondateur et président de l'Association républicaine des anciens combattants (ARAC). Ce n'est qu'en 1918, alors appelé par Jean LONGUET pour assurer la direction littéraire du journal Le Populaire, qu'il renoue avec son engagement pacifique, étant alors l'un des porte-parole de la minorité pacifiste du Parti socialiste. Adhérent au Parti Communiste français en 1923, il se lie d'amitié avec LÉNINE et GORKI au cours de voyages en URSS. Il est appelé par Marcel CACHIN et Paul VAILLANT-COUTURIER pour lancer le journal L'Humanité. Admirateur de la Révolution russe, pris dans les conflits au sein de l'Internationale communiste, il est l'instigateur du mouvement pacifiste Amsterdam-Pleyel, dont il devient le président avec Romain ROLLAND, dès la prise du pouvoir par les nazis en Allemagne. Figure du Front Populaire, ses funérailles en 1935 sont l'occasion d'un hommage important de la population parisienne. Auteur prolifique, il doit à son roman Le Feu, prix Goncourt 1916, une notoriété qui ne le quitte pas, ce qui fait de ses écrits politiques de redoutables outils de combat pour la cause communiste.

    Ce livre est longuement mûri et pensé durant les 22 mois dans les tranchées de décembre 1914 à 1916. Il tient un carnet de guerre où il note ses expériences diverses, les expressions des poilus, et dresse des listes diverses et variées. Ce carnet sert de base à la composition de son roman dont l'essentiel de l'écriture l'occupe pendant le premier semestre 1916 alors qu'il est convalescent à l'hôpital de Chartres puis à celui de Plombières.

Le roman, sous-titré Journal d'une escouade, est découpé en 24 chapitres dans lesquels Henri BARBUSSE est le narrateur et le personnage principal. Il se situe la plupart du temps en focalisation interne. A la fin de la guerre, il est accompagné par de nombreux camarades. Les dialogues campent des personnages très divers dans leurs origines et leur fonctionnement, qui se retrouvent rassemblés autour d'un désir de survie et partagent les mêmes préoccupations basiques, bien loin des stratégies des états-majors. 

Dès sa publication, le public réagit fortement, et comme pour les romans tirés d'expériences personnelles, des controverses s'en emparent vite, sur le thème de la véracité et de la crédibilité des témoignages.  Et ceci d'autant qu'il porte sur la guerre en cours. Une première controverse porte sur la véracité historique du roman, principalement en raison de la rupture profonde que marque le texte où la propagande est dénoncée. Les enjeux politiques du texte, en particulier l'engagement pacifiste, sont un autre sujet de contentieux au sujet du livre. Il est vraisemblable que les attaques sur la forme de l'écriture camouflent en partie des attaques sur le fond, soit l'opportunité de montrer ce qu'est réellement la guerre du moment. 

Une autre controverse porte sur la réalité du vécu dans les tranchées telle qu'elle est rapportée, beaucoup de critiques regrettant l'absence d'un témoignage neutre, circonstancié et complet ne s'appuyant que sur des faits. Les témoignages cinématographiques, comme les enquêtes scientifiques, notamment ceux montrés aujourd'hui, indiquent qu'Henri BARBUSSE, se voulait bien réaliste...

Pour Marie-Aude BONNIEL, dans un article publié dans plus.lefigaro.fr en septembre 2014, le Feu fait partie de cette littérature du front qui triomphe auprès du public et surtout des jurys populaires. "De valeur documentaire, ils sont des témoignages précieux". Elle rapporte un article paru dans Le Figaro du 3 janvier 1917 où l'auteur situe le roman par rapport à Gaspard, de René BENJAMIN (1916) et de L'Appel du sol de Ardrien BERTRAND (1914), qui, tous les deux, comme STENDHAL pour la retraite de Russie, s'efforcent de se détacher - moralement et physiquement - du groupe de combat que forment ses compagnons de bataille. "Henri Barbusse met une sombre ardeur et une sorte de volupté farouche à s'y confondre et s'y abîmer. (...) et les hommes parmi lesquels il vit et qu'il observe sont, en effet, les plus simples, les plus modestes, et aussi les plus émouvants des guerriers. (...) Ils restent égaux et sur le même plan, à peine distincts, sous le casque uniforme, à quelques traits de physionomie qui semblent presque négligeables quand on voit en eux des effigies de ce type sublime, de cet être superbement  représentatif sculpté dans un bloc de boue et qu'aime un idéal : le soldat de France."

Henri BARBUSSE dresse un tableau terrifiant de la misère quotidienne avec un réalisme minutieux et violent. A la lecture de son livre, on ressent d'abord l'attachement de ces hommes à la Patrie, au devoir, même si on voit bien l'expression à plusieurs reprises du pacifisme, chose bien perçue des lecteurs, qui découvrent le plus souvent l'horreur de la guerre décrite tout en ne contestant pas la nécessité de celle-ci, défensive et légitime... Ce roman est donc bien représentatif de l'état d'une opinion bien consciente de la censure militaire.

 

Henri BARBUSSE, Le Feu, Journal d'une escouade, 1916. On peut lire le texte sur Internet dans la série Les classiques du matérialisme dialectique, sur le site du Parti Communiste Marxiste-Léniniste-Maoïste de France, octobre 2013 ou sur Wikisource. Rééditions (entre autres) dans Le Livre de Poche, 1988 ou aux Éditions Payot, collection Petite Bibliothèque Payot, 2012 ou encore Éditions Gallimard, 2013. 

Marie-Aude BONNIEL, Le feu d'Henri Barbuse (1916), plus.lefigaro.fr, 16/9/2014. 

 

 

       

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17 mars 2018 6 17 /03 /mars /2018 10:13

     Ces fictions, contrairement à une tendance malheureuse propre à notre temps de les considérer comme des divertissements, constituent des témoignages même déformés de faits historiques. Pour les contemporains de ces oeuvres, ils constituaient souvent les uniques sources mémorisées des événements en cours ou proches ou encore lointains. Pour les historiens, il s'agit parfois des seules sources d'information sur des événements. A l'aide de tout un appareil intellectuel critique, ils s'efforcent d'en tirer le maximum d'enseignements, compte tenu d'une connaissance du contexte acquise par ailleurs. En vers ou en prose (ici en l'occurence, il s'agit de vers), ces oeuvres accompagnent souvent la vie de tous ceux qui n'ont pas d'instruction suffisante pour lire et écrire, et constituent un moyen de propagande important pour les puissants de ce monde, qu'ils soient seigneurs ou ecclésiastiques. Pour le coup, à côté des cantiques officiels, ils constituent souvent une source de savoirs laïcisés ou faisant appel à des discours religieux non officiels. Ces "chants" sont colportés de place en place, de villes en villages, en de multiples occasions et au fil du temps se déforment, se transforment, se chargent d'autres sens.

        Cette Chanson de Bertrand du Guesclin, 23 000 alexandrins, dont il existe plusieurs versions et plusieurs rédactions (parfois transformée en prose), dont la rédaction commencée après la mort du connétable en 1380 et terminée en 1387 (d'où sort déjà un résumé en prose), est une des dernières chansons de geste, cat elle reprend la formes des anciens poèmes héroïques. Principale source d'information sur la vie de Bertrand du Guesclin, écrite par un trouvère, CUVELIER (ou Cunelier, ou encore Cimelier), un temps à son service direct, cette Chanson est rééditée le long des siècles, et très officiellement d'abord par la Couronne de France. CUVELIER figure parmi les plus importants des trouvères et ménestriel de son époque, signalé en 1372 à la cour de CHARLES V, comme "diseur" du roi. Et comme tel, son oeuvre bénéficie de toute l'attention de la famille royale, tant comme source d'apprentissage de sa propre histoire que comme moyen de propagande à travers tout le Royaume. De même que DU GUESCLIN fait consciemment des oeuvres de CUVELIER un instrument de propagande, pour magnifier ses "hauts faits d'armes", les différents officiants à la cour en matière d'éducation se charge de la conservation et de l'usage de cette "Chanson".

    Elle influe de façon notable dont on rapporte dans quantité d'ouvrages la vie et les exploits de Bertrand DU GUESCLIN. Au-delà de son "cas", l'oeuvre constitue aussi une source d'informations sur les pratiques guerrières et les moeurs du temps, sur la formation d'un proto-nationalisme français au Moyen-âge. 

 

Bertrand DU GUESCLIN (1320-1380)

     Noble breton, connétable de France et de Catille, en service actif vers 1335-1380, participe à la guerre de cent ans, à la guerre de succession de Bretagne et à la première guerre civile de Castille. Issu de la petite noblesse, doté d'un esprit bagarreur et guerrier (participant aux tournois), il parvient jusqu'à la plus haute charge de Connétable, c'est-à-dire de responsable de l'administration et de l'armée, par sa rapidité à l'emporter sur le champ de bataille, par sa capacité à faire ouvrir les portes des villes plus par ruse que par force. A la tête souvent d'une maigre troupe de pas plus de quelques centaines d'hommes, il obtient les mêmes résultats qu'avec une grande armée, lourde, encombrante et coûteuse. S'il usurpe sa gloire (selon CONTAMINE), il excelle à galvaniser des bandes de routiers pillards et surtout à s'assurer les moyens de sa renommée. Figure utilisée (et usée de la même manière que JEANNE D'ARC d'ailleurs), par le nationalisme français du XIXe siècle et du début du XXe aussi d'ailleurs, il est l'objet aujourd'hui d'une historiographie nuancée, voire contradictoire, qui se situe surtout dans un contexte, celui d'une guerre longue dévastatrice, sans compter un épisode très meurtrier de Peste Noire, qui lasse urbains comme ruraux, petit peuple et noblesse, scrutant avec angoisse l'horizon prêt à accepter un recours saint, puissant et pieux. 

    Ce capitaine de compagnie se signale au cours du siège de Rennes en 1356-1357 où il combat Thomas GANTERBURY. En 1359, il participe au siège de Melun avant d'être fait prisonnier. Libéré après la signature du traité de Brétigny, il combat en normandie puis reprend Mantes et Melun avant de s'engager contre les Espagnols. Il est nommé connétable en 1370. Pendant dix ans, il impose une stratégie à la France (en devenir) qui lui permet de reprendre des territoires occupés par l'ennemi. Évoluant dans un contexte guerrier où le combat est ritualisé et où la tactique se résume au choc frontal, DU GUESCLIN se signale par son originalité. Pratiquent un style de guerre indirect, refusant de se plier aux lois rigides de la chevalerie, il a une approche de la guerre caractéristique de ce qu'on a appelé depuis "petite guerre" ou guérilla.

Il refuse la bataille rangée qui favorise les armées anglaises par rapport aux armées françaises. Il préfère mener une tactique de harcèlement, avec embuscade et raids nocturnes. Il cherche à déséquilibrer l'adversaire en s'attaquant à ses lignes de communications et en interceptant ses convois de ravitaillement. Il utilise sa cavalerie comme infanterie montée et offre ainsi aux fantassins une meilleure mobilité. Enfin, il sait gagner le soutien de la population pour s'en faire une alliée redoutable, notamment grâce à une propagande basée sur le colportage d'exploits par des ménestriels, dont justement CUVELIER. 

Cette guerre d'usure qui table sur des résultats à long terme est finalement payante. Ce style de guerre, que pratiquent presque systématiquement les Orientaux à la même époque, est exceptionnel en Europe durant cette période et au-delà, et c'est ce qui marque la mémoire des spécialistes de la guerre d'alors. 

Mais ce qui rend le personnage intéressant se situe sans doute aussi dans la part active qu'il prend dans la lutte contre les compagnies de mercenaires employées un peu partout, aussi dévastatrices en temps de guerre que de paix. En cela, il marque le début du remplacement de ces turbulentes compagnies par des armées professionnelles (plus ou moins) permanentes. La guerre civile de Castille est déclenchée de par la volonté du roi de France de délivrer le royaume des Grandes compagnies de mercenaires qui ravagent les provinces. Il les persuade de participer à cette guerre aux côtés d'Henri de Trastamare qui dispute à Pierre Le Cruel le trône de Castille. Il s'y couvre de gloire et anéanti ce dernier prétendant, lorsqu'il appelle les Anglais du Prince Noir, gouverneur de Guyenne. Fait prisonnier lui et ses officiers par le Prince Noir, il n'en réchappe qu'en réunissant une forte somme pour la rançon, forme habituelle de libération à cette époque. C'est un bel exemple d'élimination par épuisement des bandes des grandes compagnies, à l'image de ces Croisades bien antérieures, menées en partie pour tarir l'agressivité des chevaliers dans les royaumes engagés contre les Arabes, qui autrement les ravageraient...

Par ailleurs, DU GUESCLIN fait partie de ces personnages du Moyen-Âge qui sont les pivots, tant populaires que royaux, de la formation du sentiment national français. 

 

La formation d'un proto puis d'un sentiment national français.

   C'est sur cet aspect que s'attarde longuement l'éditeur scientifique Ernest CHARRIÈRE, dans une longue introduction de l'édition de 1839 de "Chronique de Bertrand du Guesclin" (Typographie de Firmin Didot Frères, Imprimerie de l'Institut de France).

Dans un style qui n'existe plus, on peut lire que dans ces temps, la société anarchique devait à son anarchie même un principe de vitalité dont nous n'avons pas idée, et elle pouvait souffrir sans de grands inconvénients une permanence de troubles qui serait rapidement mortelle pour les sociétés ordonnées comme les nôtres. Il entend par là les multiples malheurs quotidiens, qui frappent les diverses couches sociales, des bourgeois des villes aux paysans des campagnes, de la guerre aux épidémies, des dégradations des grandes compagnies aux mauvaises récoltes, qui sont le lot, surtout pendant la guerre de Cent ans, d'une partie des territoires convoités par plusieurs grandes familles royales. Alors que ceux-ci avaient bénéficié depuis plusieurs siècles d'une croissance économique suffisante pour supporter l'accroissement de populations, ils doivent subir calamités sur calamités, ne sachant plus trop bien vers qui se tourner pour retrouver la sérénité de jours prévisibles. "Il fallu, écrit-il, que le mal devint général pour être sensible, et que la communauté de sentiments naquit de la communauté d'intérêts froissés dans cette mêlée. (...). Mais le mal était moins dans les choses que dans les hommes, dont l'éducation était au prix de cette expérience , et quand elle fut faite, le résultat ne se fit pas attendre. Il est aussi complet que frappant, car c'est la ruine de cette féodalité désormais impuissante pour protéger l'Etat qu'elle morcelait, c'est l'expulsion du principe étranger qui aspirait à dominer le royaume qu'il partageait, c'est l'établissement de la société civile prévalant sur l'organisation militaire, c'est la  première apparition dans l'histoire du Paris révolutionnaire et démocratique jetant son intérêt de domination au milieu de ces querelles, entre une royauté trop féodale encore dans ses moeurs et ses traditions, et les vassaux qui lui reprochaient au contraire de manquer aux lois de son origines." Relâchement de l'autorité, enrichissement des exploiteurs, spoliateurs et des bandes isolées, atteinte directe aux classes maitresses de la propriété, tout cela contribue, alors que la chevalerie subit des coupes terribles, que les paysans comme les citadins sont obligés de prendre leur défense en main, les rois de France favorisent partout l'extension des droits de communes pour détacher les populations du gouvernement des Anglais ou des Bourguigons. Le problème des grandes compagnies est centrale dans cette situation, et le royaume de France s'attache de plus en plus à le résoudre. "Il se fait au XIVe siècle une représentation anticipée, un essai confus et instinctifs des idées et des systèmes qui se se développeront dans les âges suivants ; au moment de rompre avec le passé, son organisation en décadence recouvre une sorte de jeunesse, comme toutes les institutions prêtes à disparaitre, et à côté d'elles se produisent les nouveaux principes dans leurs conséquences les plus extrêmes (...)".

Le sentiment protonational fait partie de ces nouveaux principes, et il s'est déjà développé quand le héros de cette chronique entre en scène. Mais si les faits ne sont pas rapportés de façon objective et si ces versions en vers sont fortement contestées, notamment en Bretagne, le fait même que cette Chronique perdure dans le temps et dans l'espace, chantée partiellement ou en entier, en de multiples occasions, est le signe de la prégnance des caractères, des sentiments qu'elle propage. Avec son éducation fruste et "inculte", Bertrand du GUESCLIN, proche du sentiment populaire, arraché de bonne heure aux intérêts aristocratiques de sa province, conscient du pouvoir de ces vers, voulant entrainer avec lui des troupes enthousiastes et furieuses, surfe et entretient, survalorise en quelque sorte ce sentiment national naissant d'une communauté populaire en faveur d'une autorité précise, même si celle-ci est encore mal établie, faible même si l'on considère les hommes pourtant oint du Seigneur qui la portent, parfois versatile et indécis, emportés plus qu'emportant par les victoires dans une conjoncture toujours mouvante. A noter que ce sentiment n'est pas de même nature chez le peuple et chez les nobles, qui entourent le roi. Chez le peuple, et son élan enthousiaste l'emporte parfois sur les hésitations des conseillers du roi, ce sentiment est tout entier religieux, mystique, d'une croyance aux miracles que nous pourrions juger scandaleuse à notre époque. Chez les noble, l'adhésion tactique et stratégique l'emporte de beaucoup ; certains plus instruits que d'autres ne se mêlant que plein de réticences aux émotions populaires et ne partageant pas ou peu les croyances qui entourent le sacré de la personne du roi... 

 

Chronique de Bertrand du Guesclin, par Cuvelier, trouvère du XIVe siècle, édition établie par Ernest CHARRIÈRE, Paris, Firmin-Didot, 1839 en 2 tomes. La Chanson de Bertrand du Guesclin de Cuvelier, édition établie par Jean-Claude FAUCON, Toulouse, Éditions universitaires du Sud, 1990-1911, en trois tomes. Le texte de la première version cité ici est disponible sur Google.fr

Philippe CONTAMINE, La guerre au Moyen-Âge, Paris, 1980. Thierry LASSABATÈRE, Du Guesclin. Vie et fabrique d'un héros médiéval, Paris, 2015. Siméon LUCE, Histoire de Bertrand Du Guesclin et de son époque, Paris, 1976.

Arnaud BLIN et Gérard CHALIAND, Dictionnaire de stratégie, tempus, 2016.

 

     

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11 février 2018 7 11 /02 /février /2018 09:51

   S'inspirant du roman de Jaroslav HASEK (1883-1923) sur les (més)aventures d'un brave soldat de la Grande Guerre, sur les traces d'ailleurs de Bertold BRECHT qui s'en était déjà inspiré, les auteurs imaginent dans un contexte tout à fait moderne, celui de la guerre d'Irak déclenchée en 2003, celles d'un soldat de la république tchèque désireux de participer au conflit. 

   Il faut dire que le petit-fils de CHVEÏK ne démérite pas et fait honneur à la famille. Prenant au pied de la lettre la propagande des Etats-unis, il en suit exactement les termes, au grand énervement de ses supérieurs.

Dans un atelier d'écriture, les auteurs mettent en scène une sorte de pièce de théâtre, à la fois burlesque et grinçante. Ce personnage a déjà beaucoup inspiré, d'abord parce qu'on se demande longtemps - sans jamais répondre - s'il est véritablement idiot ou seulement simulateur, ensuite parce qu'il dénonce l'absurde en y adhérant de toutes ses forces, l'excès de zèle étant sa façon imparable de pratiquer le sabotage. On reconnait là une modalité de désobéissance civile, qui consiste à appliquer à la lettre les règlements, dans n'importe quel contexte, afin finalement de gripper l'institution. 

  Entre un prologue et un épilogue, on suit les pérégrinations et les états d'âme du héros, en trois période : il est entrainé dans la guerre, il se lance à la recherche des armes de destruction massive, et enfin, persuadé que la "coalition" est venue apporter en Irak la sécurité et la démocratie, veut vérifier que l'objectif est atteint. 

   Rappelons que Jaroslav HASEK, romancier, humoriste et journaliste libertaire d'origine tchèque se rend célèbre par son chef-d'oeuvre satirique Le Brave Soldat Chvéïk, gros roman publié généralement en trois parties. Il représente, avec Franz KAFKA, le renouveau littéraire pragois du début du XXe siècle. Bertold BRECHT (1898-1956), écrivain et poète allemand, rédige en 1943 lors de son exil aux Etats-Unis, un drame publié en 1965, Schweyk dans la Deuxième guerre mondiale, où il raconte comment HITLER projette et met en oeuvre l'attaque contre l'Union Soviétique. 

 

Pierre GROU, avec la collaboration de Anne-Marie FAVEREAU, La brave soldat Chvéïk dans la guerre d'Irak, Editions Syllepse, 2006, 65 pages

Joraslav HASE, Le Brave Soldat Chvéik, Gallimard, 1932, Folio, 1975 ; Nouvelle aventures du brave soldat Chvéïk, Gallimard, Folio, 1985 ; Dernières aventures du brave soldat Chvéïk, Gallimard, L'imaginaire, 2009. 

   

LITTÉRALUS (le tout nouveau arrivé!)

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